Camille Jouneaux, de La Minute Culture : "J’assume le côté artisanal de mes stories sur Insta"

Vous a-t-on déjà raconté le style préraphaélite avec des références à Beyoncé ? Ou les peintures de Klimt, dont certaines évoqueraient Max et les maximonstres ? Avec son goût prononcé pour la pop culture, Camille Jouneaux brille tant par son humour que son amour de l'art, distillés via son compte Instagram La Minute Culture, lancé en 2019 - plus de 96.000 abonnés. Elle diversifie même aujourd'hui ses formats et récits : des vidéos sur les réseaux sociaux d'ARTE, un livre paru chez Larousse Jeunesse, des collaborations avec Folio ou la RMN…

Le secret résiderait-il dans son sens de l’écriture et du « fait-maison » décomplexé ? Elle raconte à Blinkl l’heureuse saga.

Comment avez-vous créé La Minute Culture, compte Instagram aujourd’hui suivi par plus de 96.000 followers ?

En août 2017, lors d’un séjour à Rome, je créé une story sur Instagram, via mon compte perso à 400 followers, autour de ma visite de la Galleria Doria Pamphilj. Mes contacts me font d’excellents retours. C’était à une période durant laquelle je cherchais un renouvellement professionnel. Je suis alors en CDI, je bosse dans le social media. Le compte La Minute Culture ne naît donc pas de suite - il sera lancé en février 2019.

J’éprouve alors un mélange d’appréhension et d’excitation. Mais je suis incapable de mesurer la croissance très rapide que ça va avoir. Une semaine après, La Minute Culture compte 10.000 abonnés. Dix jours après, le double. Et là, je suis en PLS. « Mon dieu, de quoi j’ai accouché ! », voilà ce que je me dis.

Puis vous constatez que tout va bien finalement…

Oui. Je garde une régularité, un rythme qui me rassurent. Je prends mon temps et produis toujours une story par semaine. J’avais aussi très peur que les équipes de musées ne soient pas contentes. Et non, vu le nombre de retours enthousiastes ! J’ai aussi vite déjeuné avec une juriste pour savoir ce que je pouvais faire ou non - car les notions légales demeurent très importantes dans l’univers culturel. À partir de là, j’ai bossé uniquement sur des oeuvres tombées dans le domaine public.

« J’ai la chance d’être suivie par des gens extrêmement gentils, très curieux. »

Construisez-vous vos récits à partir des images ou de l’écrit ?

C’est indéniablement le récit qui nourrit l’image. Toutefois, ma première brique, c’est un état des lieux des ressources disponibles, et à partir de là, je peux imaginer l’histoire.

Quels sont les outils, bases de données que vous préférez utiliser ?

La base de données nationale Joconde (NDLR : on y trouve notices illustrées et fiches d'inventaire transmises par les musées), mais elle ne concerne que les collections publiques en France. Autre outil, Crotos, un moteur de recherche très pratique, malgré son nom peu sexy. C’est pas mal mais il faut tout de même croiser les infos, par exemple avec Wikimedias. Il y a aussi beaucoup de bases mises à dispo, notamment par Paris Musées, le Met ou la National Gallery.

Votre audience, vous la décririez comment ?

Elle est à 80% féminine. J’ai la chance d’être suivie par des gens extrêmement gentils, très curieux de plein de choses. D’ailleurs, je me suis réjouie du succès de ma première collaboration avec les grands sites archéologiques et la grotte Chauvet-Pont d’Arc - on sort de mon domaine habituel, l’histoire de l’art.

Et pour monter vos stories, vous avez recours à des app ou autres ?

Non. À la rigueur, je peux faire du montage sur PowerPoint parfois pour les enchaînements. Je sais qu’il y a des appli pour créer les stories, mais ça ne m’intéresse pas car j’ai envie de rester ancrée dans les usages de l’appli. Sinon, je me retrouverais avec quelque chose de trop lisse, élégant, publicitaire. Il n’est pas tellement question d’aller engager de l’énergie dans l’apprentissage de techno.

Mon sujet de fond, c’est l’écriture. Je préfère assumer le côté complètement artisanal plutôt que faire un truc... pas terrible.

De temps en temps, je vais me dire « mince, faut que j’ouvre un TikTok, un YouTube, etc. »
Mais humainement, ça n’est pas possible.

Avez-vous d’autres usages, modes de diffusion en vue en matière de médiation culturelle ?

Pour ces aspects, j’opte pour la stratégie de l’autruche. J’ai fait 10 ans de conseil dans le social media : la course à la créativité et la nouveauté se révèle donc extrêmement fatigante. Soit, de temps en temps, je vais me dire « mince, faut que j’ouvre un TikTok, un YouTube, etc. » Mais humainement, ça n’est pas possible.

Le monde de la culture est-il au point en matière de digital, selon vous ?

On y a déjà conscience de l’importance du numérique. Le musée poussiéreux, archaïque, ça fait bien longtemps que ça n’a plus lieu d’être, même si les périodes de confinement ont contribué à accélérer l’adoption de nouveaux usages, particulièrement chez les acteurs peu équipés, ou peu convaincus. Et je vois de plus en plus d’institutions qui lancent leurs canaux de créations de contenus et de diffusion en propre.

L’ouverture du monde des musées à un plus large public motive beaucoup votre travail….

Ce qui est important, c’est de rentrer dans des pratiques plus inclusives, et de sortir de l’hégémonie d’une vision académique. Le public commence à s’emparer de la culture. Il commence à être permis, voire encouragé, d’avoir un point de vue, une impression sur des œuvres, qui aille au-delà de la vision des experts.

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Le livre de Camille Jouneaux, paru en octobre 2020 : La Story de la Table ronde, illustré par Louison, chez Larousse Jeunesse.
Ses formats vidéos, L’Art sans filtre, sur les réseaux sociaux d’Arte. 

Propos recueillis par Anne-Laure Pham - annelaure@blinkl.com 
Crédits photo : La Minute Culture

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